ROUGE HARTLEY
En 2014, diplômée des Beaux-Arts de Bordeaux, Rouge choisit un nom qu’elle veut proche de sa pratique : commun, appropriable, multiple. Citadine convaincue, elle cherche le vert trottoir, la fable, la mythologie latente dans l’identité d’une rue, d’un quartier. Elle développe aujourd’hui un travail intuitif qui vise à déplacer le regard, à ouvrir des interstices dans un espace quadrillé et plaide pour la poésie. Attachée au dessin et à la peinture, Rouge travaille depuis ses débuts en proposant collages et fresques dans l’espace public.
J'essaie de fabriquer des images, et parfois de les mettre en friction narrative entre elles, à la manière d’un montage vidéo où tension de cadrage, hors champs, et travelling à venir viendrait résoudre une histoire volontairement suspendue entre les registres. Ici, un homme en plan serré ployé  sous le poids d’un camarade, jouxte une mer sombre où l’écume se veut rythme. Le visage de l’homme est coupé  par le cadrage de manière à ce qu’on ne sache ni son âge, ni s’il est heureux ou souffrant. De l’homme sur ses épaules on ne devine que la posture et le poids, et la main, agrippée au premier plan. J’avais envie depuis un moment de peindre des amitiés, des solidarités masculines, des camaraderies. De ces camarades dont on ne sait s’ils sont soûls et joueurs, où si l’un sauve l’autre d’un naufrage, si ce naufrage est géopolitique (la Méditerranée est toute proche), ou interne comme une jeunesse vacillante. Pendant que je peignais cette fresque, une passante me fit cette réflexion « c’est toujours les pauvres qui portent ; les riches eux , ils ont des poussettes, des valises à roulettes, des gens qui portent pour eux. Nous on se porte les uns les autres, on a les mômes sur le bras, les courses dans l’autre » et j’ai trouvé ça juste. Car c’est aussi je l’espère, une peinture prolo : mains labeur et vestes élimees, après tout , la ville est hantée par le souvenir des chantiers navals. Et la passante ajouta « on sent que vous peignez des gens que vous aimez » et c’est vrai : scènes de potes, scènes de clan, cette fresque espère rendre hommage à nos interdépendances. Car enfin être chez soi , être en sécurité , c’est avant tout « la possibilité d’être aidé quand on est dans le besoin ».

Réalisation:

Localisation:

Espace Gagarine

Adresse:

30 Rue Charles Nedelec